(Extrait de l’Etude des structures agricoles de la commune de Moulis-en-Médoc par l’APIETA et le Conseil Général).

D’un point de vue lithologique, la commune de Moulis-en-Médoc dans son ensemble peut se diviser en trois parties :

  • à l’Est, la géologie de la commune est dominée par les affleurements des formations fluviales de la Paléo Garonne.
  • à l’Ouest de la route départementale 1215, situé en marge du Médoc viticole, cette partie de la commune, s’inscrit dans un contexte géologique dominé par le sable des Landes, les matériaux argilo-sableux et les épandages graveleux anciens et leurs colluvions ;
  • entre ces deux entités géologiques distinctes apparaît le substratum calcaire et argilo-calcaire

En résumé, trois zones géomorphologiques sont facilement identifiables sur le territoire communal :

  • l’épandage graveleux (à l’Est)
  • les affleurements calcaires et argilo-calcaires du substratum
  • la plaine sablo-argileuse et ses épandages graveleux (à l’Ouest)

Sa situation « en retrait »

L’AOC Moulis en Médoc positionnée à l’ouest de la plupart des appellations communales du Médoc – à trois kilomètres de l’estuaire – est une des deux seules communales à ne pas avoir de façade sur la « rivière » (l’estuaire) à l’instar des grandes communales du Médoc.

Or, on peut noter l’importance qui est donnée au « liseré essentiel situé à proximité de l’estuaire » par René PIJASSOU dans la description du vignoble Médocain : « Finalement, menacé par les sables landais vers l’ouest, limité à l’est par les terres basses, le vignoble du Haut-Médoc se réduit à un mince bandeau de 3 à 4 kilomètres de largeur vers Cantenac, Margaux, Soussans ; il s’amincit encore vers Cussac-Lamarque ; puis se dilate quelque peu de Saint-Julien-Beychevelle à Saint-Estèphe où il pousse une antenne en direction de Cissac-Vertheuil. Bien sûr, le vignoble pourrait apparaître plus large au droit de Moulis et de Listrac ; il mesurerait une dizaine de kilomètres de largeur ; mais à voir ainsi les choses on négligerait les secteurs boisés et les landes qui isolent les « vignobles de l’intérieur » du liseré essentiel situé à proximité de l’estuaire ». (René PIJASSOU, dans « Un grand vignoble de qualité, le Médoc », tome 1, pages 20 et 21).

Il faut noter enfin, que cette implantation du vignoble à Moulis, témoigne de l’antériorité effective de ce dernier (« Son vignoble est sans doute l’un des plus anciens du Médoc » d’après « Bordeaux et ses Vins » de C. Féret et M.H. Lemay, 14e Edition, 1991, page 551).

En effet, aux XIVe et XVe siècles, la vigne était implantée dans les territoires de l’intérieur plutôt qu’en bordure de l’estuaire. Les viticulteurs de l’époque préféraient éviter les méfaits de l’humidité du fleuve et des brouillards, qui favorisaient la pourriture et décimaient leurs vignobles.

Eléments historiques concernant les facteurs du lien au terroir

L’AOC Moulis-en-Médoc est la plus petite des appellations communales. Les 634 hectares de vignoble qu’elle porte représentent environ 4% du vignoble Médocain.

Il faut savoir cependant qu’au XIXe siècle, son vignoble était deux fois plus important :

– En 1874 : 1 120 hectares de vignoble (Référence statistiques générales de Gironde. Féret, 1874, page 335).

– En 1892 : 1 500 hectares de vignoble, « répartis sur 200 exploitations » (Référence : Le Grand Bernard des Vins de France « Moulis Listrac » par Didier TERS, page 54).

La naissance d’un terroir (XVIIe et XVIIIe siècles)

Le vignoble moderne va naître en Médoc après les dévastations de la Fronde. La mention du premier vigneron apparaît à Moulis sur les registres paroissiaux en 1671 ; il s’agit du baptême de Jean FILLEAU, fils d’un vigneron qui demeurait à Mauvesin.

Par référence, le terroir de LAFITE (fief de Pauillac) date de 1660 lorsque Jacques de Ségur plante en vignes (source : cours de René PIJASSOU, DUAD 1982).

Il est à noter que FILLEAU est un nom « gavache », (surnom des gens issus du nord de la Garonne et parlant la langue d’oïl) ; il a fait souche à Moulis grâce au travail offert par le seigneur de Mauvesin qui devait avoir besoin de son savoir-faire dans la production de vins de qualité (source Georges BAYONNETTE, historien et maire de Moulis-en-Médoc).

Ensuite les mentions « vignerons » sur les registres de baptême vont se succéder puis disparaître par banalisation.

Les acteurs du développement Moulissois

La quasi-totalité des mariages de Moulissois et Moulissoises se faisait avec les communes limitrophes avec une fréquence importante pour Lamarque et Arcins.

Pour ne pas morceler les propriétés, on retrouve ces vieilles familles sur les quatre paroisses (Lamarque-Arcins-Listrac-Moulis) alternativement au gré de l’extinction des branches (exemple les RENOUIL, RAYMON, BERNARD, ROBERT, SEGONNES, BACQUEY).

Le vignoble originel de Moulis se développe simultanément sur tous les terroirs.

Le premier a été celui du seigneur de Mauvezin. L’extension du vignoble de graves serait plus tardive ; elle date de la folie de planter (1720, après le Grand Hiver).

Les laboureurs du Grand Poujeaux hésiteront à planter de la vigne intensivement et ce sont les grands domaines issus de la seigneurie de « Poujeau », le commandeur d’Arcins ainsi que la famille bourgeoise Lahaye Poyen, et Castaing, qui défricheront pour créer le vignoble de graves continu du Grand Poujeaux.